Légiférer, pour quoi faire ? Aujourd’hui, on légifère pour répondre aux pressions médiatiques. Un scandale = une loi. Nous sommes perdus sous une avalanche continue de normes qui sont inapplicables et inappliquées pour la bonne raison que les connaître est tout bonnement impossible (voir le principe 2 “Simplifier”). 

Mais à l’origine, ça sert à quoi, la loi ? 

La première loi qui nous vient à l’esprit, si nous cherchons une source occidentale, c’est l’Ancien Testament. Il y en a eu d’autres évidemment comme le Droit Romain (450 av JC) laïque – si beau avec sa loi des Douze Tables qui édicte par exemple :  « Cito necatus insignis ad deformitatem puer esto (Que soit tué l’enfant atteint d’une difformité manifeste). »  « Si pater filium ter venum duit, filius a patre liber esto (Si le père vend <loue> trois fois son fils, que le fils soit libéré de son père). » « Illam suam suas res sibi habere iussit claves ademit, exegit (Qu’il ordonne à sa femme d’emmener ses frusques <en cas de divorce>, et qu’elle rende les clefs). »

Le Code civil de Napoléon (1804, donc) est proche de l’Ancien Testament (possiblement écrit entre le VIIIème et le IIème siècle avant JC) sur nombre d’aspects culturels, sociaux, juridiques et politiques. Il est proche aussi du Droit Romain, mais nous allons tâcher de le montrer à partir du seul Ancien Testament ce qui est déjà tout un programme. 

A noter que nous allons ci-dessous mentionner “Dieu”, non pour dire qu’il existe, mais pour relater les textes. 

Dieu a donné à Moïse les “10 commandements” et plus de 100 lois subséquentes sur le Mont Sinaï après que les juifs aient fui l’Egypte “maison de la servitude”. C’est à dire un ensemble de principes et de règles adressés à une communauté (un peuple) sur le point de devenir une nation (sur la Terre Promise). En donnant ces 10 paroles (car le texte dit « paroles » et non « commandements »), Dieu crée l’ordonnancement d’une société, comme il l’a fait pour créer le monde ( cf la Genèse : ”Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.”). 

Ces « commandements » contiennent : 

  1. Une culture, par exemple
    • une leçon d’histoire : “C’est moi qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte” ;
    • le passage du polythéisme au monothéisme : “Un seul Dieu tu honoreras” ;
    • un dogme de la Création  » En six jours l’Éternel a fait les cieux, la terre et la mer, et tout ce qui y est contenu, et il s’est reposé le septième jour”. 
  2. Une organisation sociale, par exemple :
    • la suprématie des parents sur leurs enfants,
    • le droit de propriété,
    • l’acceptation de l‘esclavage,
    • une hiérarchie dans les relations conjugales – la femme étant rangée dans la liste de ce qui appartient au mari au même titre que sa maison, ses serviteurs, son bœuf ou son âne,
    • la protection des veuves et orphelins…
  3. Des lois positives* impératives pour que la communauté s’établisse et vive sans chaos ni violence “injuste” (hum…). Par exemple :
    • “Tu ne tueras point”,
    • “Tu ne déroberas point”,
    • avec des sanctions. Par exemple : “Celui qui frappera un homme mortellement sera puni de mort.”, “Si des hommes se querellent, et qu’ils heurtent une femme enceinte, et la fasse accoucher, sans autre accident, ils seront punis d’une amende imposée par le mari de la femme, et qu’ils paieront devant les juges. Mais s’il y a un accident, tu donneras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure.”  
  4. L’établissement d’une autorité terrestre (Moïse, chargé de faire appliquer la loi par les enfants d’Israël, et des sacrificateurs chargés d’officier les sacrifices expiatoires).  
  • Droit positif ou loi positive : on distingue classiquement entre loi naturelle et loi positive. La loi naturelle est celle qui découle de la « nature », la loi positive désigne une norme juridique établie par une instance politique. Le « Droit positif » désigne, à un moment donné, l’ensemble des règles applicables dans un espace juridique déterminé.

Quatre fonctions de la loi (culturelle, sociale, juridique, constitutive du pouvoir) qui renforce l’exercice du pouvoir sur une communauté en influençant jusque sa vision du monde. Napoléon et ses législateurs comme Portalis, ont clairement voulu faire du Code civil un corpus de lois répondant aux quatre fonctions, comme il a déjà été exposé à notre projet. Il institue pour la France entière en la laïcisant, la civilisation judéo-chrétienne inégalitaire, patriarcale, dominatrice et binaire telle que structurée par les églises.

Or… Doit-on rappeler que le Code civil actuel a la même base que celui de feu notre Empereur ? Ah le Code, notre “héritage” ! 

Par exemple, le Code de 1804 a posé le devoir de fidélité conjugale et le divorce pour faute, deux piliers de l’institution du mariage conservés jusqu’à aujourd’hui , alors que x%  des conjoints ont des relations sexuelles avec d’autres partenaires pendant le mariage et qu’un mariage sur deux (au moins) prend fin, généralement entre 5 et 15 années de mariage. La liberté sexuelle a été élevée au rang des Droits Humains et pour autant, les juges persistent à faire peser un “devoir conjugal” sur les époux. Si, si ! Voir cet arrêt abominable de la Cour d’Appel d’Aix en Provence du 3 mai 2011 par lequel trois magistrates ont décidé de confirmer la condamnation d’un époux à payer 10.000 € de dommages et intérêts à son épouse car il refusait d’avoir des relations sexuelles avec elle pendant le mariage (les motifs sont en page 5 de l’arrêt, mais attention avant de les lire, cela donne la nausée…) Et ce, sur le fondement du non moins abominable article 1382 du Code civil à la déconstruction duquel notre principe 11 du Manifeste est dédié.

*

Alors, pour une loi civilisatrice et organisatrice de la société : on dit OUI. Mais la loi de Napoléon : on dit NON.

La loi d’aujourd’hui ne tient aucunement compte de ce que nous avons appris sur l’humain depuis 1804 : que l’humain n’est pas un être rationnel mû par sa volonté, qu’il est mouvementé par ses émotions, son histoire, l’histoire de ses ancêtres, le système dans lequel il évolue, ses gênes, ses neurones miroirs et son cerveau intestinal, qu’il est partiellement composé de bactéries (si, si c’est très bien expliqué ici… et qu’il a une vocation légitime à vivre en communauté(s), en famille, ou seul s’il le souhaite selon sa singularité culturelle, sociale, sexuelle, identitaire, de liens familiaux… pour peu qu’il ne porte pas atteinte de façon abusive à son prochain.  

Chez Codecivelle, nous voulons reprendre les choses au commencement, parce qu’aujourd’hui on fait des lois sur tout et n’importe quoi en gardant pour base le Code de 1804, et cela n’a plus aucun sens ni cohérence. D’aucuns y voient l’affaiblissement de la civilisation occidentale, et nous, on ne s’en plaindra pas !  

Nous voulons penser une loi civilisatrice respectueuse de toute la Création, repensant la place de l’humain dans le monde – pour en finir avec l’anthropocentrisme – pour permettre à chacun d’agir en autonomie et responsabilité. Une loi qui montre et non une loi qui commande ou qui limite. Parce que ce que nous voyons, ce qu’une loi basée sur des interdits est réduite à une règle de jeu : quand elle nous arrange, on l’invoque, quand elle nous dérange, on la contourne ! Et lorsque vient l’heure d’être jugés, chacun vient avec ses œillères et ses  revendications en voulant “convaincre” par l’effet d’un rapport de forces.

La loi pédagogique sert d’exemple, elle tire vers le haut et, espérons-le, enseigne à vivre en liberté, altérité et solidarité. En tout cas, on va essayer…

Retour au Manifeste ici